Rester debout
Mai 2022
Chaque année, la Maison du Banquet et des générations accueille en résidence, pendant un mois, trois personnes autour d’un thème, pour leur permettre de créer dans les meilleures conditions, et de raisonner (résonner) ensemble.
Rester debout, contre vents et marées. Question d’équilibre, question de dignité. Résister. Un chemin d’existence. Un principe de création. La recherche, l’écriture, le cinéma et les arts plastiques motiveront des propositions de créations individuelles en dialogue les unes avec les autres le temps d’une résidence.
Les trois projets qui ont été accueillis du 23 mai au 19 juin sont :
Mathieu Gaulène, anthropologue et auteur.
Le pin qui se tenait debout face à la mer. De la résilience des non-humains.
Docteur en anthropologie et sémiotique du Centre de recherche sur les Risques et les Crises (CRC) – Mines Paris Tech, Mathieu Gaulène travaille depuis plus de dix ans sur l’accident nucléaire de Fukushima au Japon, d’abord comme journaliste, puis en tant que chercheur.
« À Rikuzentakata était resté debout, au milieu d’une plaine rase et grise, un immense pin solitaire. Cette histoire d’un pin qui reste debout face au désastre fait penser au roseau de la fable d’Ésope et de La Fontaine. Mais le pin solitaire de Rikuzentakata n’est ni un roseau, ni un chêne, pas même un olivier. Il ne cherche pas à s’inscrire dans le dualisme de l’interprétation occidentale. Il se contente d’être là, seul, et c’est nous humains qui le pressons de délivrer un message pour donner un sens au désastre. Quel fut le point de vue des Japonais sur ce pin solitaire, digne au milieu de la plaine ravagée de Rikuzentakata ? Notre intention est d’aller interroger, par une analyse sémiotique librement littéraire, ce qu’ont dit les humains sur ce pin, à travers les nombreuses traces qui ont été produites au Japon sur cette histoire – photographies, documentaires, articles de presse, nouvelles, témoignages. »
Hakima Metahri, doctorante en design et anthropologie.
Paroles de colonisés.
Enseignante en design et doctorante, Hakima Metahri soutiendra au printemps 2022 une thèse en design et anthropologie. Elle a réalisé, dans le cadre de son travail de recherche, des pièces de vêtements qui mettent à l’honneur les complexités culturelles des personnes issues de l’immigration et les stratégies élaborées afin de se fondre dans la société française ou au contraire de s’en démarquer.
« Je souhaite faire vivre des témoignages recueillis dans mon travail de thèse, et les mettre en images afin de donner un autre regard sur cette génération vieillissante et invisibilisée dont les récits disparaissent petit à petit avec eux. Je souhaiterais donner à voir ces témoignages sous la forme d’une bande-dessinée, du roman graphique, d’histoires courtes illustrées et ainsi rendre compte de ces moments de résistance qui jusqu’ici sont restés dans la sphère privée. Il ne s’agit pas forcément de formes de résistances spectaculaires mais simplement de moments de vie durant lesquels on questionne son statut dans un contexte d’oppression et l’on résiste subtilement, souvent par l’humour et la débrouillardise. Ce travail permettrait de réhabiliter cette génération, de mettre en lumière ces combats discrets pour leur dignité et celle de leur descendance. »
Rester debout avec le Bumba.
Sandrine Teixido est docteure en anthropologie sociale et ethnologie. Elle s’intéresse dans ses recherches aux régimes d’attention en situation de catastrophes, qui ont donné lieu à plusieurs écrits scientifiques. Elle enseigne au département d’anthropologie de Paris-Nanterre.
Elle a publié une ré-écriture éco-féministe aux éditions Cambourakis, Hellsegga, 2020. Elle a également présenté plusieurs expositions de son travail artistique et animé des ateliers d’écriture. Elle fait partie du duo artistique A tale as a tool avec l’artiste suisse Aurélien Gamboni.
« Le 7 avril 2010, au Bumba, dans la périphérie de Niterói au Brésil dans l’État de Rio de Janeiro, un glissement de terrain fait 48 morts, 267 disparus et de nombreux sans abris. Pour cette résidence, j’aimerais explorer ce qui persiste de cette catastrophe, la manière dont les femmes, les hommes, les plantes, les maisons, les déchets « restent debout ». De manière formelle, il s’agit de travailler une écriture polyphonique où chacune des entités (femme, homme, plante, objet, substance toxique) parlerait à la pre- mière personne. Les écouter parler, les entendre persister. Parlent-ils avec des phrases, des onomatopées ? Quelle est leur langue propre ? Faire entendre également ce qui ne persiste pas, ce qui s’écroule, ce qui justement n’arrive pas à tenir debout ou ce qui persiste autrement, les morts, les fantômes. Tenter de saisir l’équilibre précaire entre persistance et écroulement. »
La résidence s’est tenue du 23 mai au 19 juin 2022
La restitution de leurs travaux menés en résidence, durant 1 semaine, aura lieu à la mi-octobre 2022.
Pour plus de renseignements :
Retrouvez l’appel à projets ci-contre et découvrez sur la page des résidences partagées les projets et créations des années précédentes.
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